Bonjour. Aujourd’hui, nous allons aborder des questions de complexité pour essayer une fois de plus de comprendre quels types d’instruments et de gouvernance nous pouvons mettre en œuvre pour le développement durable, pour une meilleure politique de développement durable. Donc complexité et enjeux de gouvernance pour le développement durable. Pour l’économie écologique qui est aujourd’hui un courant assez dominant en matière de politique de développement durable, il faut reconnaître un certain nombre d’éléments. Les incertitudes qui sont au cœur des avancées scientifiques, des enjeux de distribution d’accès, et donc au service écologique avec des questions d’équité inter- et intra-générationnelle, et puis la nécessité d’arbitrage des conflits entre différentes dimensions, comme par exemple dans le cas de la COP21 qui était vraiment une question d’arbitrage, et puis la diversité de valeurs et de formes culturelles puisque les préoccupations par rapport à la nature ou par rapport aux enjeux sociétaux et économiques ne sont pas les mêmes en fonction des différentes sociétés, des différentes cultures. Donc il est important de tenir compte de cela puisque les politiques de développement durable ne peuvent pas être les mêmes partout et d’ailleurs, c’est ce que nous avons obtenu au niveau de la COP21 puisque, contrairement à ce qui s’était préparé dans les différentes négociations antérieures, cette fois, et on tient compte des propositions des différents pays pour parvenir à une diminution des émissions de CO2. Et on ne se préoccupe plus de donner des règles qui soient standards et les mêmes pour l’ensemble des pays. Le point important, c’est aussi de regarder quels sont les types d’indicateurs auxquels on fait référence désormais. Il y a bien entendu des indicateurs économiques comme le PIB qui est largement insuffisant. Il y a d’autres indicateurs, et par exemple des indicateurs de développement humain qui ont été proposés au niveau des Nations Unies pour tenir compte aussi de la dimension sociale du développement durable et pour tenir compte de l’état de développement social d’un pays. Donc l’indicateur de développement humain est un indicateur qui vient compléter l’indicateur économique du PIB et cet indicateur de développement humain, cet indice de développement humain, est en quelque sorte un indicateur de la dimension sociale du développement durable. Il faut savoir qu’il existe aussi d’autres indicateurs qui viennent les compléter, qui sont des indicateurs synthétiques, physiques, pour tenir compte des pressions environnementales. Donc on en a différentes catégories, qui sont exprimées en différents types d’unités, d’énergies, de masse. Et ces indicateurs ont connu beaucoup de succès depuis les années 1980. Ceux qui en ont été à l’origine sont notamment des pays comme l’Allemagne. En Allemagne, on peut parler du Wuppertal Institut qui est un institut de recherche extrêmement important qui travaille aussi sur tous les secteurs économiques, pour des entreprises, pour essayer de calculer leur impact, leur utilisation de matières premières, faire des bilans en matière de leur activité, alors que c’est par exemple un indicateur qui est le MIPS qui est un indicateur en termes de contenu matériel d’une production ou de contenu énergétique d’une production. Il y en a un dont vous avez dû entendre parler qui est celui de l’empreinte écologique, l’empreinte écologique d’un territoire ou d’une activité. On peut calculer aussi l’empreinte écologique d’une activité. C’est un indice de soutenabilité environnementale que l’on compare entre d’un côté un indicateur de pression environnementale qui concerne la quantité finalement de terre nécessaire pour produire tel ou tel bien, et de l’autre, on le compare à la bio-capacité d’un même territoire. Donc il y a beaucoup de calculs qui ont été faits pour cela, calculer l’empreinte écologique d’une activité, l’empreinte écologique d’un colloque par exemple. Et pour vous donner une idée, il y a des travaux qui ont mesuré l’empreinte écologique de l’activité économique francilienne et les résultats sont assez interpellants puisqu’on se rend compte que l’empreinte écologique du francilien moyen est de 5,17 ha globale par an et par habitant alors que la bio-capacité, donc la capacité de charge du même territoire est de 0,47 ha globale par an et par habitant. Ce qui signifie que finalement, le francilien moyen consomme beaucoup plus de terres que n’en comporte la seule métropole parisienne. En d’autres termes, cela signifie que le francilien moyen utilise des contenus de terre qui sont pris ailleurs. Donc cela a un impact global important sur l’ensemble de la planète. C’est ce qu’on appelle l’empreinte écologique, qui peut constituer un indicateur complémentaire à des indicateurs économiques et des indicateurs sociaux. Vous voyez que dans l’approche de l’économie écologique, on va articuler plusieurs dimensions, plusieurs types d’indicateurs pour pouvoir décider, prendre des décisions au niveau macroéconomique. Mais il va en être de même au niveau micro d’une entreprise puisqu’on va avoir différentes catégories d’indicateurs. Ce que nous apporte aussi l’approche économie écologique, ce sont des instruments de politiques aussi. Elle va tout simplement nous dire qu’il ne faut pas être dogmatique et que l’on peut utiliser aussi bien les instruments qui sont liés à une vision de la soutenabilité faible où on considère que l’économie est finalement la régulation principale, marchande, qui va aussi impacter la nature, et ce qu’elle nous dit cette approche, c’est qu’on peut mêler ces instruments avec des instruments qui sont plutôt liés à une vision très forts, où il s’agit de ne plus toucher la nature, donc plutôt des instruments de régulation, et de nouvelles formes d’instruments, qui sont plutôt des instruments finalement de négociation. Quelques exemples, on va avoir à ce moment-là toute une palette d’instruments : des normes techniques, des normes d’exploitation, des normes de qualité, des interdictions, mais aussi tous ceux qui relèvent de l’incitation économique avec des taxes, des redevances, des dépôts, des certificats d’émission, des droits à polluer, et puis des approches d’engagement négociées comme par exemple aux Pays-Bas où on a ce qu’on appelle des covenants qui sont des instruments qui permettent à une entreprise ou à un secteur de prendre un engagement de limiter ses émissions de CO2 ou sa consommation de telle ou telle ressource naturelle. Elle prend un engagement et cet engagement fait l’objet d’une signature tripartite entre l’entreprise ou le secteur, le gouvernement et toute une série d’acteurs de la société civile. Donc on voit bien qu’il y a là une mixité possible d’utiliser des instruments lorsqu’on n’est pas dans une vision totalement dogmatique et c’est bien ce vers quoi on s’oriente par exemple dans le cas du changement climatique et des politiques de lutte contre le changement climatique puisqu’on laisse à chaque pays désormais le choix de trouver l’instrument ou les instruments qui lui permettent de mieux répondre à ces objectifs. Donc on peut avoir toute forme de ces différents instruments, toute formulation, tout mélange qui peut être utilisé. Alors, on a aussi, dans cette approche de l’économie écologique, des principes et des politiques de responsabilité vis-à-vis des générations présentes et futures, c’est–à-dire qu’on se préoccupe des impacts de toute activité économique par rapport aux dimensions sociales et environnementales et on parle de responsabilité envers les générations futures. Et là, on se réfère au *Principe de responsabilité* d’un philosophe allemand, Hans JONAS, qui date de 1979, son *Principe de responsabilité*, qui va irriguer aujourd’hui beaucoup de travaux autour par exemple de l’innovation responsable, mais aussi autour par exemple de l’entreprenariat social et responsable. Donc on voit bien que là aussi, un principe important qui va avoir des impacts directs, ce principe de responsabilité, par exemple au niveau juridique où on parle du principe de responsabilité étendue pour le producteur, c’est-à-dire que désormais, une entreprise est responsable de ses actions mais aussi des actions de ses fournisseurs en matière environnementale et sociale. Donc si elle ne prend pas en considération ces éléments, en termes juridiques, elle risque d’avoir beaucoup de difficultés. Ce principe de responsabilité étendue, par exemple au niveau juridique, a été mis an place par la Commission Européenne dès le début des années 2000. On parle aussi du principe de précaution avant de prendre une décision en matière économique, en matière politique, c’est-à-dire qu’il faut être sûr qu’on ne fait pas courir de risques environnementaux ou sociétaux trop importants. On voit bien que là on est dans tout un univers où il s’agit de tenir compte de cette incertitude et de trouver des instruments qui permettent de tenir compte de cette incertitude. Cela nous amène à tout ce qui est la délibération publique et de l’importance de faire entrer et de donner une légitimité sociale à toutes les décisions et c’est la raison pour laquelle on va, pour toutes les questions qui peuvent avoir des impacts environnementaux comme par exemple ici les déchets nucléaires, des impacts environnementaux irréversibles même, il est proposé de plus en plus de travailler sur une gouvernance participative et de faire rentrer des processus d’aide à la décision de types participatif et concertatif. Voilà un petit peu les pistes que nous propose aujourd’hui l’économie écologique pour pouvoir régler les questions d’environnement et plus largement de développement durable. Je vous remercie.