Bonjour Nous allons parler aujourd’hui de l’économie écologique. L’économie écologique, c’est un courant qui s’est développé dans le sillage du développement durable qui a commencé déjà à émerger dans les années 1980 au niveau international. Nous allons voir la contribution de l’économie écologique et ses apports en matière de politique de développement durable. On peut dire que ce courant a connu au départ un succès mitigé et qu’il regroupait un certain nombre d’économistes critiques par rapport au courant dominant et des économistes qui venaient du monde entier, aussi bien en France, René PASSET dont on a déjà parlé, aux Etats-Unis Bob COSTANZA, Herman DALY, également en Suisse dans le monde entier. Donc ils se sont constitués en société : société internationale pour l’économie écologique, ecological economics, et aujourd’hui, il s’agit d’une société extrêmement puissante qui est à l’origine de beaucoup de politiques économiques du développement durable, notamment au niveau de la Commission Européenne. Et ils ont constitué, cet ensemble d’économistes qui est extrêmement nombreux, des milliers aujourd’hui au niveau international, ils ont constitué une revue qui est parmi les meilleures revues académiques Ecological Economics. Cette vision ecological economics renoue avec les visions plus anciennes du développement par rapport à la nature, qu’il s’agisse des visions des physiocrates ou des économistes classiques, et ils vont aussi emprunter une vision assez pragmatique pour pouvoir proposer toute une gamme d’instruments et de modélisations économiques pour aider les décideurs publics, privés, les décideurs au niveau macro-économique mais aussi au niveau des entreprises. Ils vont surtout introduire cette idée de capital naturel spécifique et de capital naturel critique. Ils vont faire la distinction finalement entre différentes formes de capital pour leur permettre d’établir finalement des politiques qui soient des politiques viables. D’abord, ils vont tout simplement indiquer que tout ce qui est ressource épuisable comme le charbon, le pétrole, comme les matières premières minérales, celles-ci ne posent pas de problème véritable sauf leur utilisation qui entraîne des émissions de pollution et que finalement elles pourraient très bien, et surtout cela serait intéressant, être remplacées par des progrès techniques qui permettraient par exemple d’utiliser des ressources renouvelables, les ressources énergétiques renouvelables. Donc finalement, ce capital naturel-là, pas besoin de le sauvegarder. En revanche, ils vont faire ensuite toute une série de distinctions pour les différentes formes de capital naturel et, de ce point de vue, ils vont dire que le capital naturel est spécifique parce qu’il n’est pas homogène. Celui sur lequel il va falloir se focaliser, c’est sur le capital naturel critique, c’est-à-dire celui qui peut poser des problèmes de renouvellement et des problèmes finalement de survie à l’humanité. Ils vont être finalement à l’origine de la comptabilité patrimoniale. En France, par exemple, au niveau de l’INSEE, puisque 1986, la France va être quelque part à la pointe de ses préoccupations et sortir une comptabilité patrimoniale qui fait bien cette distinction entre les différentes formes de capital naturel, et c’est tellement vrai que vous voyez là tous les services environnementaux par rapport au capital naturel qui sont distingués, le capital naturel en tant que source, c’est-à-dire apport de ressources naturelles exploitables, le capital naturel comme donnant des services de puits, c’est-à-dire réceptacle de déchets et pouvant traiter même les émissions de pollution, le capital naturel comme support de vie pour l’espèce humaine et les autres espèces, et le capital naturel avec les cinq sens, c’est-à-dire tout ce qu’il peut apporter aux cinq sens, donc des distinctions assez intéressantes qui vont permettre à ce moment-là d’opérer des distinctions pour pouvoir avoir des politiques qui soient pragmatiques et opérationnelles. Alors, ils sont aussi à l’origine de toutes les interrogations autour d’un PNB qui soit calculé sous d’autres formats pour tenir compte justement de la dégradation du capital naturel. Il va y avoir dans le sillage des économistes écologiques beaucoup de travaux au niveau de la Banque Mondiale, au niveau d’Eurostat, sur le revenu national soutenable, sur le PNB soutenable, qui vont avoir lieu dans les années 1990-2000. Depuis quelque temps, on en parle beaucoup moins mais il est évident que cela va ressurgir et que nous allons assister à une modification des modes de calcul de ces agrégats puisqu’aujourd’hui, il faut savoir que le PNB est calculé de telle sorte que plus on pollue, plus on augmente le PNB, parce que plus on pollue, plus on va avoir des activités de dépollution qui apportent de la valeur ajoutée. Or, tout ce qui est lié à la pollution n’a pas de prix, comme on l’a déjà vu dans des séquences précédentes. Donc en fait, cet indicateur de croissance économique qu’on utilise de toute part n’est pas un indicateur viable pour le développement durable. Il faut le calculer différemment pour tenir compte de la dégradation du capital naturel. Ce sont des orientations que nous proposent ces économistes appelés ecologicals economists. Ils vont tout simplement dans le sens, encore une fois, des économistes classiques que nous avons déjà eu l’occasion de rencontrer puisque que nous dit par exemple John Stuart MILL en 1848, il dit : « On ne peut se dispenser de déterminer les droits que chacun a la faculté d’exercer sur chaque portion de l’héritage commun - donc on va parler d’héritage commun - et les conditions auxquelles il peut les exercer. Aucune fonction du gouvernement n’est moins facultative ou plus intimement liée à l’idée d’une société civilisée que la fonction qui consiste à régler tout cela ». Donc, ce que nous disent les économistes ecologicals economists, n’est ni plus ni moins cela : trouvons les moyens de régler tout cela et trouvons des politiques pragmatiques. Ils vont avoir plusieurs aspects : des aspects pour respecter la capacité de la biosphère, c’est par exemple tous les modèles qui ont été développés pour savoir comment agir en matière de changement climatique et de lutte contre le changement climatique, ou c’est aussi les travaux autour de l’économie circulaire qui ont pu être réalisés grâce à leur modélisation extrêmement intéressante, mêlant en fait les relations entre l’économie et la nature. Donc, on peut dire que grâce à l’économie écologique, on dispose aujourd’hui d’approches multicritères avec un très grand nombre d’indicateurs aussi bien sociétaux, environnementaux et économiques, qui peuvent co-évoluer et qui peuvent permettre finalement de réguler les différentes sphères qui nous préoccupent. Et puis, ils sont à l’origine aussi d’instruments, d’outils de prospective, de veille prospective sur les risques technologiques, environnementaux et sanitaires, et ils nous ont proposé aussi des procédures de négociation et d’arbitrage que nous aurons l’occasion de rencontrer dans d’autres séquences. Donc nous pouvons dire qu’aujourd’hui, c’est grâce aux travaux de l’économie écologique qui a su mêler les apports de façon pragmatique des uns et des autres pour fournir des instruments de régulation, à la fois de l’environnement mais plus largement du développement durable. Merci.